La Corse a eu droit aux honneurs, lors du dernier festival de Cannes. Après A Son Image, chronique d’une époque brulante sur l’Ile de Beauté signée Thierry de Peretti (en salle depuis le 4 septembre dernier), c’est au tour de Julien Colonna de dévoiler son film insulaire. Son premier long-métrage, Le Royaume, sort au cinéma le 13 novembre 2024.
Chacun des deux réalisateurs s’est attelé à dépeindre sa vision de l’île sur laquelle il a grandi. Pour Julien Colonna, cela prend la forme d’un film de gangster. Une œuvr de fiction inspirée dans les grandes largeurs de son histoire personnelle et qui dépeint une bouleversante relation filiale au milieu d'une guerre des gangs baignée de vengeance et de mort.
Corse, 1995. Lesia (Ghjuvanna Benedetti) vit son premier été d’adolescente et entend bien le passer avec son amoureux, à la plage. Un jour, un homme fait irruption et la conduit à moto dans une villa isolée en plein maquis corse où elle retrouve son père (Saveriu Santucci), en planque, entouré de ses hommes. Une guerre éclate dans le milieu et l’étau se resserre autour du clan dirigé par le paternel qui n’a d’autres solutions que de se terrer.
Le drame plane, la mort frappe, décimant de manière millimétrée les fous de ce jeu d’échecs, dans l’espoir d’atteindre le roi de ce royaume. Commence alors une cavale sous forme de road-movie au cours de laquelle père et fille vont apprendre à se regarder, à se comprendre et à s’aimer, passant de planque en planque, de villas avec vue sur mer en camping défraichi.
Avec son casting intégralement corse et ses comédiens pour certains non-professionnels (Saveriu Santucci est agriculteur et guide de montagne dans la vraie vie ; tous sont d’une grande justesse), Le Royaume place le spectateur en témoin privilégié des actions-réactions à l’intérieur de ce clan corse sous haute-tension. Mais sans jamais verser dans le folklore voyeuriste.
C’est d’ailleurs un choix narratif des plus intéressants que celui de proposer un point de vue jeune et féminin dans ce monde d’hommes - tellement hors de ce milieu codifié qu’elle en fait de naïves erreurs d’appréciation. Ou comment la jeune fille va se creuser une place parmi ces mâles qui la surprotègent, passant de la découpe quasi-initiatique d’un sanglier en pleine nature à l’innocence qui quitte petit à petit ses yeux d'adulescente. L’âge adulte frappe fort à la porte.
Au cœur de ce film d’apprentissage, Lesia va apprendre les règles et les traditions de la communauté dans laquelle elle est née, perçant les secrets et les non-dits de ce père qui tente envers et contre tout de la préserver. Car derrière ce polar qui s’enfuit vers l’avant, c’est bien cette relation père-fille qui touche au cœur.
"Au travers de cette relation filiale qui peine à exister dans un contexte où tout se meurt, j’ai souhaité montrer la voyoucratie dans son inévitable extinction programmée. Dépeindre ces hommes comme les pénitents de leur propre existence qui portent leur croix jusqu’à la chute." explique Julien Colonna. On ne dira pas mieux.
A venir très prochainement !
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