Maldoror de Fabrice Du Welz avec Anthony Bajon: Notre avis sur le film inspiré de l'affaire Dutroux

Le nouveau film de Fabrice du Welz, Maldoror, s’inspire librement d’une terrible histoire qui a marqué le pays du réalisateur belge : l’affaire Dutroux. Et qui d’autre que lui pour décortiquer, par le menu, cette enquête sidérante qui vit s’opposer la gendarmerie, la police communale et la police judiciaire, cette gueguerre des services (ils fusionnèrent, par la suite, en 2001) provoquant un ensemble de dysfonctionnements terribles - et même funestes.

Belgique, 1995. La disparition inquiétante de deux jeunes filles bouleverse la population et déclenche une frénésie médiatique sans précédent. Paul Chartier (Anthony Bajon, la nouvelle coqueluche du cinéma français), un jeune gendarme idéaliste de la brigade de Charleroi, rejoint l'opération secrète Maldoror dédiée à la surveillance d'un suspect récidiviste, Marcel Dedieu (Sergi Lopez). Confronté aux dysfonctionnements du système policier et plus déterminé que jamais à découvrir qui se cache derrière ces horreurs, il se lance seul dans une chasse à l’homme qui le fera sombrer dans l’obsession. 

Aux confins du film noir et du polar haletant, Maldoror s'avère pourtant moins violent et jusqu’au-boutiste que les précédents films du réalisateur belge - qui réussit même à insuffler un peu de vie dans le paysage mortifère de Charleroi, cette ancienne cité argentée du temps de la métallurgie, en filmant avec une grande légèreté la nouvelle vie de jeune marié du gendarme Chartier au sein de sa belle-famille d'immigrés italiens.

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Mais ce n'est qu'un leurre. Place ensuite à l’enquête policière et au temps long des investigations qui ont mené à la capture du pédophile en 1996. Retrouvant son casting habituel (Laurent Lucas, Jackie Berroyer, Alba Gaïa Bellugi) ainsi que des petits nouveaux (Alexis Manenti), Fabrice Du Welz tente de cerner le mal profond, à la manière de Lautréamont dans son œuvre Les Chants de Maldoror qui donne son nom au film.

Durant les deux premiers tiers, le film s’attache à relater de manière très précise et documentée la véritable enquête (à l'image de la fameuse scène du gendarme qui entend des chuchotements d’enfants dans la maison de Marcinelle), tout en prenant soin de modifier les noms et prénoms de chaque protagoniste de l'affaire, accusés comme victimes - Marc Dutroux devient Marcel Dedieu, Michel Lelièvre Didier Renar, Michelle Martin Monique Marini, ou encore Michel Nihoul qui devient Jacky Dolman.

Mais Maldoror prend un tout autre tournant dans son dernier tiers, basculant sans crier gare dans l'uchronie la plus inattendue... pour ne pas dire maladroite ? Car en donnant une importance toute particulière à certaines théories (sur les fameux ‘réseaux de notables’, pourtant débunkées depuis par la justice), le réalisateur fraye avec le complotisme, et en prenant le parti d’extrapoler de manière fictive une histoire aussi marquante que l’affaire Dutroux, le réalisateur belge nous met entre les bras un bébé à deux têtes, au procédé moralement osé.

Si la fin du film sera cathartique pour certains, ce fantasme de justice ne plaira probablement pas aux personnes les plus touchées par l’affaire Dutroux.

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