Les images circulaient déjà depuis bien longtemps sur le net et il m'était difficile de croire en ce joker en garde à vue, au maquillage dégoulinant et aux cheveux gras, après avoir connu celui de Jack Nicholson. Non c'est vrai, tout le monde disait que ça allait être le meilleur de tous, (je n'aime pas écouter tout le monde) qu'il allait surclasser le " Batman " de Tim Burton, faire oublier " Batman Le Défi ", et mettre au second plan la première réalisation de Christopher Nolan, " Batman Begins ". Je me refusais à le croire. Comment remettre en scène le Joker ? Comment rendre cet épisode crédible, au point de surclasser tous les autres ?
Je devais me forger ma propre opinion. Impatient et à aucun moment conditionné par tout ce qui a été dit, j'ai tout simplement été surpris. Il a l'apparence d'un remake mais ce n'en est pas un, il ne ressembla à aucun autre, les principes inculqués sont bouleversés, et les méchants perfectionnés. C'est presque indiscutable, Christopher Nolan a réussi le Batman parfait, un nouveau concept de l'adaptation du comics-book, du suspens sur la durée, de l'action, des retournements, de la noirceur à faire peur, de l'angoisse et du génie. On en redemande alors que le film a duré 2h30.
Mais ce nouvel épisode n'aurait jamais eu tant de retombées positives sans un Heath Ledger totalement métamorphosé, lourdement méconnaissable, et à l'interprétation pointilleuse tout simplement parfaite. Il éclabousse à lui tout seul le film d'un talent insoupçonné. Sans aucun doute, et sans dénigrer aucun autre acteur, il est le personnage clé du film.
A la fois drôle et effrayant, détestable et charismatique, angoissant et inimitable, c'est de loin le personnage le mieux interprété du film. C'est l'un des méchants les plus crédibles d'Hollywood et le plus terrifiant de tous les "Batman". Et pourtant, l'homme chauve-souris nous en a fait voir des méchants psychotiques aux tendances terroristes. Jack Nicholson et Danny de Vito étaient jusque là indétrônables à Gotham City, aussi bien dans leur interprétation, qu'au niveau de l'image qu'ils renvoyaient. Et pourtant à chaque fois Batman restait prédominant. " The Dark Knight " utilise le héros pour mettre en scène un Joker magnifiquement défiguré, diaboliquement crédible, et pour qui le crime n'est ni question d'argent, ni de reconnaissance, c'est un message, un message de terreur dans lequel il baigne et auquel le monde doit être confronté. La destruction pour le plaisir de détruire. Sadique et masochiste, le Joker devient un personnage incontrôlable et insaisissable par la terreur qu'il renvoie et par l'idée d'anarchie à laquelle il confronte la société.
A travers ce personnage, extravagant, sans aucune limite, mais surtout étonnamment sérieux, Christopher Nolan parvient à introduire plusieurs thèmes dans son film : " l'impact à la fois positif et négatif du justicier sur la ville, le respect des règles qu'imposent la loi ou un code d'honneur auquel Batman, les effets du pouvoir et de l'aspiration au pouvoir ". Comme le dit le réalisateur, l'arrivée de Batman à Gotham a eu pour effet de faire fuir un certain nombre de malfrats, " cependant cette omniprésence " et ce " nettoyage par le vide a attiré des personnages encore plus malfaisants, encore plus puissants et bien décidés à prendre le contrôle de la ville. " Le Joker est le méchant emblématique, et l'exemple typique de cette malveillance qui s'est abattue sur la ville. Il vient remettre en question Batman, ainsi que les représentants de la loi.
Basé sur son premier opus, Christopher Nolan ne revient plus du tout sur la dimension fantastique dans laquelle baignait " Batman Begins ". " The Dark Knight " présente un rythme soutenu avec très peu de moments calmes, une musique omniprésente et angoissante qui nous plonge dans la paranoïa, la terreur que nous offre le film. La qualité des scènes d'action est époustouflante, et bien que le film traite d'un super héros, il n'en est pas moins réaliste, aussi bien dans l'interprétation des personnages, la réalisation de l'histoire, que dans l'utilisation des effets spéciaux. Le réalisateur a souhaité utiliser la technologie IMAX, afin de plonger le spectateur au cœur de l'action et rendre son film le plus réaliste possible. Cette technologie, présente dans six scènes d'action, permet une projection d'images de dimensions et de résolution supérieures au cinéma traditionnel.
Un film à voir, aussi bien pour les fans de Batman, que pour ceux qui apprécient le cinéma et l'interprétation de qualité. Un coup de chapeau à Heath Ledger, sans oublier la prestation de Christian Bale en tant que Bruce Wayne/Batman, crédible et réajustant comme il se doit la double personnalité à laquelle le héros est confronté. Sans oublier Aaron Eckhart en Harvey Dent, chevalier blanc à visage découvert, qui représente la loi et la victoire.