Tori et Lokita des frères Dardenne, prix du 75e Festival de Cannes : notre critique

Nouveau passage par le Festival de Cannes, où ils ont remporté la Palme d’Or pour Rosetta en 1999 et pour L’Enfant en 2005, pour Jean-Pierre et Luc Dardenne avec leur nouveau long-métrage Tori et Lokita, présenté en compétition officielle. L’on y suit l’errance en Belgique de Tori (Pablo Schils) et Lokita (Joely Mbundu), deux mineurs réfugiés béninois. A découvrir au cinéma le 5 octobre 2022. 

Bande-annonce de Tori et Lokita :

Le jeune Tori, haut comme trois pommes, et l’adolescente, un brin plus âgée, sont livrés à eux-mêmes et se retrouvent, par leur entrée illégale sur le territoire belge, tout en bas de l’échelle sociale. Mais comme souvent chez les frères Dardenne, certains barreaux de l’échelle sont sciés, d’autres recouverts d’une bonne couche d'huile, d’autres encore carrément manquants, et cette fratrie recomposée semble destinée à rester à sa place. Violence des mots et des gestes. 

De la première scène où Lokita est contrainte de répondre à une avalanche de questions posées par une assistance sociale afin de déterminer si Tori, qui vient d'obtenir ses papiers, est bel et bien son frère de sang, jusqu’à la dernière scène marquante du film que d’aucuns trouveront poussive, les Dardenne posent les carcans d’une société exploitante et manichéenne où aucun humain n'accepte de tendre la main aux deux jeunes gens - le cuisinier, également dealer et violeur, leur fait livrer de la drogue, le passeur béninois les rackette, leur empêchant d’envoyer leurs quelques économies à la famille, très insistante, restée au pays. 

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Un sentiment d’irréalisme et une difficulté à y croire s’installent alors, tant cet enchainement de situations plus dramatiques les unes que les autres semble exagéré et d’avance voué à l’échec. Heureusement, la nature profonde de l’amitié entre Tori et Lokita dans cet exil solitaire amène du cœur à ce film social, humaniste et militant, comme dans toutes les œuvres des frangins belges. À fausse fratrie, véritable amour, porté par la révélation Pablo Schils, petit génie débrouillard qui transpire de courage et de bienveillance pour sa sœur de cœur et qui, de sa voix monocorde, énonce avec pragmatisme des vérités, des conseils, des bons mots et du réconfort. 

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