Comédien césarisé pour son film "Guillaume et les garçons, à table !", figure de la Comédie-Française, Guillaume Gallienne se dévoile ici dans une activité qu'on ne lui connaissait pas : la mise en scène d'opéra. Pour sa première fois dans cet exercice après une commande de Stéphane Lissner, le comédien s'est entouré d'une équipe de choc : de son ami et collègue Eric Ruf à la scénographie d'abord, puis, d'Ottavio Dantone pour la direction musicale. Et tout ça, sur le plateau de la plus prestigieuse scène lyrique française, celle du Palais Garnier.
La Cenerentola, opéra de Rossini inspiré du conte de Perrault, met en lumière cette jeune fille rabaissée plus bas que sol, considérée comme une esclave, une moins que rien au sein de sa propre famille. Angelina de son prénom, rebaptisée Cenerentola, Cendrillon (incarnée par Teresa Iervolino), vit dans un monde clos et littéralement fait de "cendres". C'est en s'appuyant sur cette étymologie qu'Eric Ruf a monté sa scénographie : un vieux palais italien délabré, des murs rouges témoins des splendeurs et des horreurs passés et un tapis de cendres au sol. Le résultat est, comme toujours, sublime, et nous transporte dans un autre temps. On aperçoit les palais de jadis, les mosaïques sur les murs de Pompéi, les voix du passé qui viennent chanter à nos oreilles nostalgiques.
Les deux sœurs (Chiara Skerath et Isabelle Druet), espiègles et idiotes, sans la moindre grâce ni dans la tenue ni dans le comportement, évoluent sans se soucier de l'extérieur dans ce ancien temple luxueux, dont elles ne devinent pas les signes avant-coureurs. Quand elles refusent d'aider un mendiant venu frapper à leur porte, le sort, déjà, en est jeté.
"La seule chose qui importe, c'est que vous deveniez princesses !", leur répète leur père, beau-père de la Cenerentola, puisque dans Rossini, le féminin est souvent remplacé par le masculin. Un beau-père donc (Maurizio Muraro), une brute grossière, bête et perverse plutôt et d'une méchanceté sans limite. Malgré l'amour naissant du Prince déguisé en valet (le ténor Juan José de Leon) pour Angelina, malgré les demandes du valet déguisé en Prince (le baryton Alessio Arduini), il refuse : Angelina n'ira pas au bal. Mais c'était sans compter sur Alidoro (le très acclamé et éblouissant Roberto Tagliavini), penchant masculin de la marraine la fée, qui, dans une figure pieuse et religieuse, réussira à imposer sa volonté, celle de récompenser la bonté.
La délivrance viendra comme un pardon, dans toute la bienveillance qui caractérise un personnage d'une pureté irréel. Cendrillon épousera le Prince, dans un dernier tableau à la beauté renversante qui rappelle les grandes fresques historiques de couronnements royaux. La Cenerentola devenu princesse, assise au milieu de la foule, son Prince debout à ses côtés, chante qu'elle veut être plus noble et que le trône lui-même. Ainsi, elle pardonne à ses sœurs, elle pardonne à son père. Et à l'assemblée de clôturer :
"Elle m'attendrit et m'émeut,
C'est une déesse à mes yeux ;
Tu es digne du trône,
Mais un trône est bien peu de chose pour toi."
Pari réussi pour Guillaume Gallienne qui a trouvé avec cet opéra magnifique un terreau parfait pour exercer toute sa créativité. Sur scène, la beauté se mêle, bien joyeusement, à un humour évident et assumé qui ne laisse personne insensible. Esthétiquement, les inspirations picturales sont saisissantes et redonnent à cette histoire sont paysages originels, celui de l'Italie napolitaine, de la chaleur des étés brûlants et des volcans alentours.
Infos pratiques :
La Cenerentola au Palais Garnier, du 10 juin au 13 juillet 2017.
Tarifs : de 10 à 210€
Réservations : 08 92 89 90 90
Dates et Horaires
Du 10 juin 2017 au 13 juillet 2017
Lieu
Opéra de Paris - Palais Garnier
8 Rue Scribe
75009 Paris 9
Accès
Métro :
Station Opéra (ligne 3, 7 ou 8)
Auber (RER A)