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· Publié le 10 novembre 2011 à 19h29
Mercredi 9 novembre se tenait au théâtre de la Huchette, la première de la pièce « Un Banc à l’ombre ».
Pièce écrite par
Sasha Pairon,
Un Banc à l’ombre a été écrite il y a quelques années déjà, alors que le printemps arabe n’était même pas envisageable.
Pourtant, en assistant à la représentation on ne peut s’empêcher d’y penser, tant la réalité a rattrapé la fiction. Un pays moite, lourd de chaleur, où s'installe une révolution menée par le peuple en crise. Un peuple bercé d’idées de meilleur et d’espoir. Un peuple qui a renversé le pouvoir et qui tente aujourd’hui de reconstruire leur pays, malgré le manque de soutien, le manque de moyen.
L’été est caniculaire, en bas de la colline, l’air est irrespirable. Niobé, qui tient son prénom d’une Reine de Thèbes est enceinte de son premier enfant (elle en aura 14). Légèrement vêtue, elle monte en haut de la colline, sur une place longeant un ancien monastère, car l’air y est plus frais. De là, on peut y voir la mer, et dans le temps, ce monastère actuellement tenue par les rebelles, était son pensionnat. Aujourd’hui, on y juge et exécute les prisonniers politiques de la ville. Sur cette place en haut de la colline se trouve l’unique banc à l’ombre de la ville. Chaque jour, Niobé monte les 320 marches qui la séparent de cette place, uniquement pour respirer cet air qui lui fait du bien, à elle et au bébé qu’elle porte.
Mais le monastère et la place du banc à l’ombre font aujourd’hui parti d’un espace sécurisé, et il est formellement interdit de s’y promener. Myla, rebelle, est celle qui est en charge de faire régner cette loi, et demande à Niobé de s’en aller. Cependant, celle-ci revient chaque jour, et raconte à Myla sa grossesse, ses habitudes… Bientôt, ces deux femmes que tout sépare, commencent à se dévoiler, à se confier l’une à l’autre, et même, à s’apprécier. Très vite, la véritable raison de la présence de Niobé finira par surgir, mettant Myla dans une situation, de plus en plus délicate.
Ces deux femmes, interprétées par
Sylviane Goudal et Dominique Scheer, apparaissent ici comme la preuve même du courage féminin, de l’amour sans limite des femmes pour ceux qu’elles aiment. Au cœur d’une société où l’espoir est tout ce qu’il reste, elles sont deux héroïnes de leur destin et deux ferventes défenseurs de la justice. Le jeu est puissant, émouvant, drôle. Chacune dans son rôle, nous touche et nous transporte dans sa zizanie.
L’actualité politique actuelle des pays arabes donne certainement à cette pièce l’intensité qui aurait pu lui manquer. Rattrapée par le printemps, elle nous apparaît aujourd’hui comme une véritable histoire dans l’Histoire. Dans nos mémoires résonnent le bruit de la révolution, ces images qui pendant de nombreux mois, ont hanté nos esprits.
Véronique Barrault à la mise en scène, nous offre un très beau moment de théâtre.
Sur cette petite scène hantée par l’esprit et le jeu de Ionesco (ndlr : le Théâtre de la Huchette présente depuis 54 ans sans interruption «
la Cantatrice Chauve » et «
la leçon »
d’Eugène Ionesco), il est bon parfois, d’inviter de nouvelles têtes. La preuve, cela peut-être une excellente surprise…
Un banc à l’ombre au Théâtre de la Huchette.
Du lundi au dimanche à 21h (sauf le samedi), et le samedi à 16h30.