"La vie n'est pas un panier de fraises, Audrey !". Stanislas Nordey, ou Stan, comme elle l'appelle, a décidé de partir. "C'est fini, Audrey", dit-il. Avec la rage profonde dissimulé derrière des mots abruptes. Il s'en va, et il lui explique pourquoi, car il estime quand même qu'elle a le droit de savoir. Dans un monologue d'une heure, il parlera, lui expliquera. Un amour qui s'éteint, un couple qui se sépare, c'est une vie qui se brise, c'est un monde qui s'écroule, c'est un dos qui se cambre et une tête qui tombe. Il exige cependant de la droiture dans la tenue de celle qu'il a aimé, c'est une femme forte, la plus forte du monde, elle doit garder la tête haute, et ne pas tomber dans le cliché de la tristesse amoureuse. Sa diction est sèche, sincère, directe, son attitude insolente, ses mots sont violents, mais toute la richesse de ce texte se trouve aussi dans l'humour qui s'y cache.
Le texte de Pascal Rambert est incroyablement beau et musical. Extrêmement dur aussi. Lui, pour justifier cette rupture, doit bien être sec avec elle, comment le croirait-elle sinon ? Avec beaucoup de sécheresse, il dit pourquoi ses seins ne lui font plus rien, pourquoi ce ventre sur lequel il s'était tant reposé ne l'appelle plus, pourquoi cette peau, il l'a remplacera peut-être par une autre peau... Audrey (Bonnet) encaisse, sans dire un mot. Son heure viendra, qu'il ne s'inquiète pas, son heure viendra. Quand elle vient, c'est avec une violence presque romaine qu'elle répond aux accusations qui, une heure durant, lui ont été faites. Son regard est noir, mais digne elle reste, même si parfois, la tristesse l'emporte sur la fierté d'une femme blessée.
Stan n'est pas aussi fort qu'Audrey, ou du moins, il ne peut le dissimuler trop longtemps : quand elle parle, il s'effondre, se recroqueville. Quand elle le frappe de sa langue acerbe, il s'écroule. Quand elle se justifie de ce qu'elle estime complètement faux, il ne peut dire un mot, et ne peut pas non plus quitter cette grande pièce blanche, ce cube lumineux où est enfermé leur amour, leur vie, leur passé. Ils doivent le quitter pourtant, mais ils ne sortiront pas de cette salle. Entre allitérations et assonances, le texte de Pascal Rambert justifie son immense succès où qu'il se produise. Il faut des comédiens de taille pour assumer une pareille œuvre, et Nordey et Bonnet sont absolument parfaits. Le public attentif rentrera bouleversé, certains pleureront, d'autres, trop pressés (une séparation peut-elle est bâclée en une heure ?), seront partis depuis longtemps, ne laissant, au moment des applaudissements, qu'une foule conquise.
Infos pratiques :
Clôtures de l'Amour au Théâtre du Rond-Point du 22 février au 2 mars 2014.
Du mardi au samedi à 20h30 et le dimanche à 15h.
Tarifs : de 13 à 38€
Réservations : 01 44 95 98 21
Lieu
Théâtre du Rond Point
2Bis Avenue Franklin Delano Roosevelt
75008 Paris 8
Accès
Métro Franklin D.Roosevelt