La semaine dernière, sept associations ont saisi en urgence le tribunal administratif afin d'ordonner à l'Etat de rouvrir l’enregistrement de la demande d’asile en Île-de-France.
Cette semaine, le tribunal a rendu son jugement et a donné raison à ces associations. Il ordonne aux préfectures et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) "de reprendre l'enregistrement des demandes d'asile afin de mettre un terme à l'atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile, en adoptant toute mesure de nature à faire cesser cette atteinte tout en garantissant la sécurité des personnes, dans un délai de deux jours sous astreinte de 3 000 euros par jour de retard."
En effet, le tribunal administratif a jugé que la loi sur l'état d'urgence sanitaire passée le 23 mars dernier ne devait pas priver les demandeurs d'asile de ce droit fondamental.
Le tribunal ordonne également "la réouverture de la plateforme téléphonique multilingue (de l’Ofii) dédiée à la prise de rendez-vous en guichet unique pour demandeur d’asile (Guda), pour l’enregistrement des demandes d’asile" et oblige tous les acteurs de l’Etat à rétablir la chaîne de l’asile en France pour permettre aux demandeurs de bénéficier à la fois d’un lieu d’accueil et d’une allocation.
Soulignant une "maltraitance institutionnelle", les sept associations se félicitent de la décision du tribunal administratif, pointant du doigt une "situation totalement inédite: prenant prétexte de l'épidémie du Covid-19, les services préfectoraux ont progressivement été fermés et l'Ofii a annoncé le 22 mars 2020 qu'il suspendait l'accès à sa plateforme téléphonique, empêchant désormais tout dépôt de demande d'asile en Île-de-France et par voie de conséquence, toute prise en charge de ceux et celles qu'il lui revient de protéger."
"Mais que se passera-t-il demain ? Peut-on espérer voir le ministère de l'Intérieur, les préfectures et l'Ofii se conformer à la décision du juge ? On a toutes les raisons d'en douter" se demandent encore la Ligue des Droits de l'Homme, l'Acat, le Gisti et les différentes associations à l'origine du référé. "Si cette décision est ignorée une nouvelle fois, nous continuerons sans relâche à nous battre pour que les personnes en attente de protection puissent faire valoir leurs droits."
Confortant l'injonction du tribunal administratif, le Conseil d'Etat a également ordonné à l'Etat, ce jeudi 30 avril, de reprendre l'enregistrement des demandes d'asile en Ile-de-France. Le juge des référés, Christophe Chantepy, écrit ainsi dans son ordonnance : "Il est enjoint au ministre de l’Intérieur de rétablir en Ile-de-France, dans un délai de cinq jours à compter de la notification de la présente ordonnance et dans les conditions sanitaires imposées par le Covid-19, l’enregistrement des demandes d’asile, en priorité de celles émanant des personnes présentant une vulnérabilité particulière."
Alors que les flux migratoires sont "globalement à l'arrêt", en cette période de confinement et d'épidémie de Coronavirus, la décision du Conseil d'Etat vise à soutenir "des demandeurs qui étaient là bien avant la crise sanitaire et qui se tournent vers l’asile pour bénéficier de l’allocation" qui leur est dédiée, précise Didier Leschi, le directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).