Vraie mesure ou enfumage ? Le gouvernement s'est félicité de soutenir une proposition d'amendement au budget de 2021, stipulant que le soutien de la France aux projets pétroliers et gaziers à l'étranger serait diminué progressivement d'ici 2025 pour les projets pétroliers, et 2035 pour les projets gaziers. Une mesure loin d'être suffisante pour les ONG écologistes.
En 2019, aux Nations Unies, Emmanuel Macron s'engageait à mettre en place un plan pour le climat en France : « Il faut que les grands pays de ce monde arrêtent de financer de nouvelles installations polluantes dans les pays en voie de développement. Nous continuons encore aujourd’hui à avoir du financement export et des projets dans tant de pays, financés par des pays développés. (…) C’est incohérent, c’est irresponsable. Soyons lucides avec nous-mêmes. » Ces propos, rapportés par le journal Le Monde, résonnent aujourd'hui avec ironie aux oreilles des militants écologistes.
Le gouvernement a en effet soutenu un amendement visant à mettre fin au soutien français aux énergies fossiles, mais en suivant un calendrier bien trop étendu dans le temps au goût des ONG. Serait-ce parce que l'État conserve des avantages financiers dans l'exploitation des ressources fossiles ?
La banque publique d’investissement, Bpifrance, permet à l'État de gérer un système de garanties d'export. De fait, grâce à BpiFrance, l'État se porte garant de prêts auprès des banques, pour les entreprises françaises qui participent à des projets gaziers ou pétroliers, des raffineries ou qui équipent des centrales électriques au gaz ou au charbon. Un soutien gouvernemental important, puisque la garantie de l'État encourage d'autres investisseurs à s'engager dans ces projets, et donc à leur donner vie.
Parmi les bénéficiaires de ce système, on retrouve le grand site gazier Yamal LNG, porté par Total en Russie, ou des turbines à gaz exportées par l’usine General Electric de Belfort.
D'après les recherches du Monde, depuis 2009, la France a délivré pour environ 9,3 milliards d’euros de garanties selon la direction du Trésor. Cette somme, les associations écologistes la traduisent comme une subvention de l'État aux énergies fossiles ; un geste en désaccord avec les objectifs climatiques affichés de la France.
Des intérêts financiers
Repousser l'arrêt du soutien aux industries fossiles de 15 ans revient à nier ou ignorer l'urgence climatique qui pèse sur l'environnement, selon les militants écologistes. Face à cela, les députés se défendent : « Je comprends qu’il puisse y avoir une forme d’insatisfaction, mais la France est vraiment en avance sur le sujet, elle peut créer un effet d’entraînement au niveau international », affirme le député du Gard, Anthony Cellier (LRM), qui défendra l’amendement à l’Assemblée. « 2035 est une date butoir, je suis convaincu que le soutien au gaz s’arrêtera avant », explique le député. De plus, l'amendement prévoit que le Parlement puisse se saisir à nouveau du sujet en 2023, pour éventuellement ajuster la trajectoire.
L'État priorise-t-il vraiment ses intérêts financiers au lieu des impératifs climatiques ? Ce qui est sûr, c'est que les industriels du secteur des énergies fossiles préfèrent retarder le plus possible la fin du soutien étatique. La grande majorité de ces industries n'a pas commencé sa transition vers les énergies plus vertes. Au contraire, ces entreprises se sont entièrement tournées vers les hydrocarbures.
La filière parapétrolière française, qui compte environ 50 000 emplois, réalise plus de 90 % de son chiffre d’affaires à l’export. L’État est d’ailleurs actionnaire de certains groupes du secteur comme TechnipFMC ou Vallourec.
Pour essayer de modifier la tendance, le gouvernement envisage de mettre en place un système de « bonus climatique » pour aider des projets plus « soutenables ».