Covid : ce que l'on sait du virus et ce que l'on ignore toujours, un an après

Par Cécile de Sortiraparis · Photos par Rizhlaine de Sortiraparis · Publié le 7 avril 2021 à 16h38
D'où vient-il, comment a-t-il pu contaminer la totalité de la planète en seulement quelques mois, comment s'en débarrasser ? La pandémie de Covid-19 a entraîné beaucoup d'interrogations, dont certaines demeurent sans réponse. Que sait-on de ce virus qui a bouleversé nos vies en moins d'un an ? On fait le point.

Un troisième confinement, des écoles et des commerces fermés, des lieux culturels, des bars et des salles de sport qui n'ont pas vu en visiteur depuis des mois... Il est difficile à l'heure actuelle de penser que la pandémie sera bientôt terminée. Si, en France, on peut avoir l'impression d'être coincé dans une bulle temporelle depuis mars 2020, il est bon de rappeler que l'on a connu de grandes avancées dans notre connaissance et notre façon de soigner la Covid-19.

Les communautés scientifiques du monde entier étudient ce virus depuis des mois. Un tel travail, cette association sans précédent de cerveaux a permis de faire avancer la recherche à une vitesse folle. Olivier Schwartz, responsable de l'unité Virus et Immunité à l'Institut Pasteur, explique à France Info que le nombre de publications scientifiques sur le coronavirus bat des records. « Si je tape Covid sur le site PubMed, qui recense tous les articles scientifiques, j'obtiens 12 000 articles recensés, sans compter tous les articles en prépublication. À titre de comparaison, pour le VIH, on en est à 380 000, soit à peine trois fois plus avec quatre décennies de recul. [On constate] des progrès énormes sur la compréhension du virus, son fonctionnement, sa structure, et la façon dont il entre dans l'organisme et se multiplie dans les cellules infectées », se réjouit Olivier Schwartz.

L'arrivée de différents variants a également jeté un éclairage nouveau sur la façon dont le virus mute. « Le virus s'est retrouvé soumis à une pression de sélection, c'est-à-dire qu'il a été confronté à des populations immunisées, soit parce qu'elles avaient déjà été infectées, soit parce qu'elles avaient été vaccinées. Pour survivre, il a fait en sorte d'être plus infectieux, afin d'avoir un avantage sélectif qui lui permet de se propager mieux au sein de la population », dévoile le professeur.

De fait, le virus a su évoluer rapidement et efficacement, puisque les variants sont désormais les formes les plus répandues en France.

La Covid-19 est un virus qui se transmet essentiellement par aérosols et par les postillons. C'est pourquoi il est si important de porter un masque et d'aérer les espaces clos. Anne-Claude Crémieux, infectiologue à l'hôpital Saint-Louis, à Paris, rappelle pour France Info que « L'importance des aérosols explique les supercontaminations qui se sont produites en milieux fermés et mal ventilés. (...) Dans le mode de transmission, on a surestimé au départ la contamination par les mains, par les objets, et sous-estimé les aérosols. »

Son confrère, le chercheur en mécanique des fluides au CNRS à Montpellier Simon Mendez, ajoute que l'on « sait maintenant que les contaminations dans une pièce par aérosols peuvent avoir lieu à des distances plus grandes qu'un ou deux mètres et sur des temps plus longs que ce qu'on croyait au début. On sait aussi qu'il y a des grandes variations d'un moment à l'autre, suivant le stade de la maladie, et d'une personne à l'autre. Si neuf personnes n'en contaminent aucune, et qu'une seule personne en contamine dix, le taux de reproduction de la maladie sera égal à 1 [seuil au-delà duquel elle continue de se propager]. C'est ça aussi qui est dur à gérer avec cette maladie, ce n'est pas uniforme. »

Quels symptômes ?

De fait, ce qui a rendu la détection et le traitement de cette maladie si dur au début de l'épidémie, c'est qu'elle peut prendre des formes différentes selon les personnes infectées. Perte de l'odorat et du goût, difficultés respiratoires ou symptômes moins inquiétants comme la fièvre, la toux, les maux de tête, les courbatures... La Covid-19 se décline selon des formes plus au moins graves et peut souvent être confondue avec d'autres maladies.

De plus, les chercheurs savent désormais que le virus peut se transmettre de personne à personne 48 heures avant l'expression des symptômes. C'est donc d'autant plus difficile de limiter la propagation du virus.

En un an, on trouve tout de même quelques bonnes nouvelles. Les formes graves du coronavirus sont bien mieux traitées désormais. « On a appris à faire une meilleure prise en charge grâce aux corticoïdes, aux anticoagulants et à l'oxygénothérapie. C'est le trépied qui évite le passage aux réanimations avec ventilation mécanique. Depuis l'an dernier, la mortalité a ainsi diminué pour les patients sévères, et se situe désormais à 30% », se réjouit Anne-Claude Crémieux.

La vaccination des personnes les plus fragiles fasse au virus permet également de faire baisser les courbes de mortalité. Ces vaccins montrent d'ailleurs leur efficacité face aux formes graves du virus. Une étude récente réalisée en Écosse montre qu'un mois après la première dose du vaccin Pfizer ou de l'AstraZeneca, les personnes vaccinées avaient beaucoup moins de risque de développer une forme grave de la maladie pouvant les conduire à l'hôpital.

Il faut également souligner la rapidité incroyable à laquelle les chercheurs et les laboratoires ont pu mettre au point des vaccins efficaces et jugés sûrs par les agences et les autorités de santé. 

Ce que l'on ne sait pas

Malgré toutes ces avancées, de nombreuses zones d'ombres planent toujours sur la Covid-19. D'où vient ce virus ? Un temps suspecté, le pangolin n'est désormais plus dans la liste des suspects. Après avoir mené son étude, l'OMS a rendu un rapport qui soulève plus de questions qu'il n'apporte de réponses. 

Les experts internationaux chargés du dossier offrent quatre théories possibles, dont la fuite d'un laboratoire et la transmission d'un animal non identifié à l'humain. « Malgré les investigations conduites par les autorités chinoises, aujourd'hui, aucune évidence scientifique ne permet de tirer une conclusion parmi les différentes hypothèses proposées pour expliquer l'origine du Sars-CoV-2 », regrette Étienne Decroly, virologue.

Il est pourtant important de comprendre comment cette épidémie a commencé, si l'on veut éviter que cet événement se répète. « Si on n'identifie pas les mécanismes sous-jacents à la naissance de l'épidémie de Sars-CoV-2, on prend le risque de rejouer des situations épidémiques similaires dans les prochaines années », explique le virologue à nos collègues de France Info.

Autre question sans réponse : la répartition inégale du virus dans le monde et dans certains lieux. « On a été très frappé au cours de cette pandémie par une hétérogénéité dans la propagation selon les territoires, note Anne-Claude Crémieux. On peut essayer d'analyser cette hétérogénéité, mais on a du mal à la prévoir. Est-ce que les facteurs climatiques jouent un rôle ? On ne sait pas, ni pourquoi certaines régions sont plus exposées que d'autres. »

Les scientifiques s'interrogent également sur le nombre réel de personnes contaminées par la Covid-19 depuis le début de l'épidémie. Entre les cas non reconnus et les personnes asymptomatiques, la proportion de personnes qui ont déjà été infectées est sans aucun doute beaucoup plus importante que ce qui est recensé actuellement.

La durée de l'immunité des personnes guéries ou vaccinées est également un sujet de préoccupation. Elle semble varier de personne à personne. Cette inconnue est un élément clé pour vaincre l'épidémie et retrouver une vie normale. Malheureusement, pour le moment, aucun schéma clair ne semble se dégager.

Anne-Claude Crémeux s'interroge sur l'avenir : « On sait que le vaccin va permettre une diminution de la circulation du virus. Mais est-ce qu'on va vers une circulation virale à bas bruit ou vers un zéro Covid, avec suppression du virus ? »

Olivier Schwartz renchérit : « Toute épidémie a vocation à s'éteindre, mais on ne sait pas quandLorsqu'une certaine immunité aura été atteinte par le vaccin, va-t-il y avoir encore des vagues, des vaguelettes ? On l'ignore. »

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