Comment pardonner à sa propre mère quand elle n’a rien vu ? Comment continuer à vivre quand celle qui est censée vous protéger contre le monde entier n’a rien fait, n’a pas bougé ? Célie Pauthe, bouleversée par le roman de Christine Angot Un amour impossible, le met en scène avec beaucoup de discrétion et diffuse la beauté de ses mots sur le plateau des Ateliers Berthier.
Christine est née de père inconnu. Ce père absent est idéalisé par sa mère, malgré le déni, malgré le mépris. Née de père inconnu. Il n’est pas inconnu pourtant, il a juste refusé de participer. Chrstine le rencontre malgré tout, quelques années plus tard. Elle l’aime beaucoup au début, il est si intelligent ! Il parle plusieurs langues, vit dans un grand appartement. Par plusieurs signes pourtant, elle tente de faire comprendre à sa mère que la relation se dégrade. Cela se passe mal. Elle n'a plus envie d'y retourner, mais ne sait mettre des mots sur sa pensée.
Mais la mère, aveuglée par son amour encore intacte pour cet homme (bien qu'elle prétende le contraire), n’y voit que du feu. Pire, elle interprète les signes de façon personnelle. Quand sa fille rentre bouleversée, elle pense que c’est parce qu’elle ne veut pas la retrouver, elle. Quand sa fille lui touche le bras, elle pense que c’est pour la consoler, elle. Elle ne voit rien, aveuglée. Elle ne fait rien. « Si, j’ai fait une infection, quand même ! », répond-elle, des années plus tard, les reproches sous le nez, une fille qui a du vivre avec le trauma sous les yeux. En effet, quand elle apprend ce qui se passe entre le père et la fille (briser le plus grands des interdits sociaux et moraux, le viol), elle fait une infection des trompes, empêchant ainsi sa fille de se rendre à Paris où elle devait rejoindre son père. Mais… est-ce suffisant pour se reconstruire ?
Ce texte de Christine Angot est probablement le plus difficile que l’écrivaine ait écrit de sa carrière. Que Célie Pauthe en ait été bouleversée, c’est compréhensible. C’est bien que l’envie d’en faire une pièce ait fonctionnée, que la parole se propage. Que ces mots d’une beauté terrifiante soient entendus. L’interprétation de Bulle Ogier et de Maria de Medeiros est profonde, subtile. Bulle Ogier, dans la retenue, est grandiose dans le rôle d’une mère qui, même à la fin de sa vie, n’aura toujours pas compris malgré une fille brillante et relevée malgré l’horreur. On regrette peut-être une mise en scène trop blanche, presque glacée. Mais quel texte !
Infos pratiques :
Un amour impossible au Théâtre de l'Odéon, du 25 février au 26 mars 2017.
Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h.
Tarifs : de 8 à 36€
Réservations : 01 44 85 40 40
Visuel : © Elisabeth Carecchio
Dates et Horaires
Du 2 mars 2017 au 26 mars 2017
Lieu
Ateliers Berthier
32 Boulevard Berthier
75017 Paris 17
Accès
Métro 13 ou 14 Porte de Clichy