Report : Un Dostoïevski Trip décapant au Théâtre de Vanves

Par · Publié le 1er janvier 2012 à 21h28
Du 6 au 9 décembre, le Théâtre de Vanves accueille la Compagnie Volens-Nolens, mise en scène par David Léjard-Ruffet pour une adaptation d'un texte de Vladimir Sorokine paru en avril 2011.
Sur scène, des livres, par centaines, déchirés et démembrés. Dans la certaine Russie où se déroule l'histoire, on pourrait presque croire à de la neige.

Les 7 protagonistes, qui partagent les planches de Panopée, sont en rond. Ils ne nous parlent pas vraiment. Pourtant, en sourdine, ça rie, ça discute. Progressivement, la conversation devient audible, et très vite, nous comprenons : ces 7 là, ils sont en manque. En manque de leur cam'. Mais alors cette cam', c'est de la drogue, ou c'est des bouquins ? On aime croire que les deux ne font qu'un. Qu'un accroc à la littérature, ça existe vraiment.

De Flaubert à Maupassant, en passant par Joyce, par Dumas, par Dickens, cette troupe semble avoir tout testé, ou presque, et s'échange les goûts et les dégoûts, sans ménager sur les impressions : "Même Simone de Beauvoir m'a pas fait autant de mal que Tolstoï!".

Les 7 attendent le dealer, qui ne vient pas. Alors ils s'engueulent. Ils s'insultent. Ils se battent, un peu, gentiment. Quand enfin, elle arrive, elle leur propose une nouveauté : du Dostoïevski. Dernière cam' arrivée sur le marché, ils ne peuvent refuser, et les voilà parti dans un trip au cœur de l'univers d'un des plus fameux écrivains russes. Les voilà tombés dans la scène du dîner de l'Idiot. Ils troquent leurs insultes et grossièretés contre un langage raffiné et courtoisie. Nastassia Filippovna, le prince Mychkine et leur compères... Le Trip a atteint son sommet.

Bien vite, la descente, comme toujours. Parfois, elle est calme et paisible. Le Dostïevski Trip lui, est violent. On brûle, on arrache des livres, et on raconte une dernière histoire avant de dormir.

Dans cet étrange trip littéraire, Sorokine, auteur russe contemporain des plus controversés en sa Terre Natale, offre une profonde dégringolade dans l'excès. Ses mots sont sublimés par une mise en scène audacieuse signée David Lejard-Ruffet, qui n'hésite pas à porter l'attention du spectateur sur les dites controverses : cette scène pleines de livres éventrés, n'est naturellement pas sans rappeler les manifestations de la Jeunesse Poutinienne en 1999, qui luttaient contre le roman Le Lard Bleu de Sorokine, en détruisant les ouvrages place publique.

Folie, excès, violence... A l'image des réactions de ses lecteurs, Sorokine offre un texte qui ne cesse de surprendre. La Compagnie Volens Nolens ne ménage pas ses efforts pour nous transporter dans un tourbillon intemporel de dégoûts, de rire et de littérature. Une troupe bien prometteuse, qui ne peut laisser indifférent.

C'est à se demander si, parfois, le Théâtre de Vanves déçoit par sa programmation... Encore une fois, bravo.

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