Ce n’est pas rien que de s’attaquer à William Shakespeare. Roméo et Juliette est une œuvre qui peut sembler simple, accessible et abordable, par son caractère populaire, sa grande notoriété, ses jeunes amoureux transits : mais au contraire, c’est une pièce qui nécessite énormément de justesse, et donc, de travail. Hors, celui présenté par David Bobee fait se lever un grand nombre de connaisseurs de Shakespeare : le Théâtre National de Chaillot se vide, et ce n’est que très rarement, que l’on voit des spectateurs quitter la mythique salle Jean Vilar.
Pourquoi, alors ? Pourquoi les amateurs du dramaturge anglais boudent-ils l’adaptation de David Bobee pour le Théâtre National de Chaillot ? Il y a certainement plusieurs raisons à cela. La première, et la plus évidente, se tient, incontestablement, dans la nouvelle traduction de Pascal et Antoine Collin. "Roméo est une petite merde", dit Mercutio. Moderniser oui, saccager une œuvre, non. On se souvient de la traduction d’Olivier Py l’an dernier qui elle aussi, avait pour but de moderniser l’œuvre : là, on y avait vu de l’intérêt, le travail était reel, nous n’avions pas affaire à une vulgarisation du texte, où sous prétexte que nous sommes en 2012, Roméo peut se permettre de dire "J’ai pris cher".
Autre raison des multiples départs des spectateurs, c’est le jeu en lui-même. Roméo et Juliette est une pièce synonyme de passion, de fougue : Bobee nous offre le triste tableau de deux très beaux comédiens (on ne peut pas leur retirer ça) qui jouent faux, sans aucune emotion degagée. Le ton est bancal, mal ajusté, la diction floue… Quelle déception d’entendre des jeunes, sans doute talentueux, passer complètement à côté d’une œuvre, rater le coche, metttre de l’émotion là où il n’en faut pas, et survoler les scènes clées de la pièce, comme celle du balcon, celle du mariage des amants -que l'on découvre mélodramatique, presque triste- ou la mort de Tibalt, aussi peu touchante qu'une scène banale. La nourrice, encore une fois adaptée sous les traits d'un vulgaire personnage, met un point final au mauvais goût general.
Alors certes, la scénographie est belle, les décors rayonnants et lumineux, cette transposition des amants dans un Orient chaud peut être intéressante : mais une belle scène et de beaux acteurs, ça ne fait pas une belle pièce, surtout, quand on s’attaque à un mythe… Des chants et des danses au cœur de Vérone, c’est certes très agréable à regarder et à entendre, mais c’est hors propos, et à trop vouloir en faire, on passe à côté de l’essence meme du texte, et donc, de la pièce. Même si, on le sait bien, le mélange des genres (danse, théâtre et acrobatie) est, le plus souvent la force de David Bobee.
Dates et Horaires
Du 15 novembre 2012 au 23 novembre 2012
Lieu
Palais de Chaillot
Place du Trocadéro ,
75116 Paris 16